Alain Emery semble se sentir bien avec nous, du coup il revient et nous offre un petit bonheur à déguster de suite et sans modération. Quelle chance ! Merci Alain !
Au début, il y a un banquet, calé sur la terrasse, des verres qu’on lève contre rires et boucans, et la nuit qui – comme toujours – vous rattrape. C’est à peine si on se voit. On accroche dans les arbres une lampe, elle attire autour d’elle une grêle de hannetons. On cherche la Grande Ourse. On refait du café. Aux épaules apparaissent quelques châles mais personne, pourtant, ne parle de rentrer. On grignote un morceau. On sort de vieux alcools, de ces cerises à l’eau de vie, qu’on gobe goulûment ; dont on crache le noyau dans le creux de sa main avant de le jeter, en riant, sur l’ombre la plus proche. Et puis, au beau milieu de tout, il y a ce regard. Qu’on croise et qu’on échange, pendant quelques secondes, avec le père, l’épouse, l’ami de longue date, avec celle ou celui dont l’âme passe, par miracle, au cœur même de la vôtre ; il y a ce regard aussi tendre qu’inattendu et le temps qu’on prend d’y glisser ces milliers de petites choses qu’on osera jamais dire. Ça pourrait ne durer qu’un instant si une fois vos yeux détachés des siens, tandis qu’au-dessus de vous le ciel est d’un noir immense, vous n’aviez à jamais le loisir d’en savourer la trace…